Le billet de Sarah Roubato sur Mediapart a fait le tour des réseaux sociaux ce week-end. Je le trouve extrêmement bien écrit et je partage sa vision. J’aurais voulu moi aussi crier « tous en terrasse » quelques jours après les attentats de Paris pendant lesquels j’ai eu la peur de ma vie, mais quelque chose me gênait. La lecture de ce texte m’a éclairée. J’ai voulu en savoir plus sur Sarah, elle a tout de suite répondu à mes questions.
– Qui êtes-vous Sarah ? Quel est votre parcours ?
Je suis une pisteuse de paroles. Je vais voir des gens dont personne ne parle et j’écoute leurs histoires. J’essaye de transcrire en mots ce qui ne se dit pas. Plus académiquement j’ai une formation d’anthropologue et d’auteur compositeur interprète. Mais que ce soit sur un terrain d’ethnologie ou en écrivant des chansons, je cherche la même chose.
– Quelle est l’histoire de ce billet ? Déclic ou longue réflexion ?
Ce n’est pas un déclic car je ne pense pas avoir trouvé la clé d’aucun Graal. C’est le fruit d’une réflexion dans le sens où cela traduit des idées que j’ai depuis longtemps, et que je distille dans mes écrits depuis deux ans. Mais cettre lettre n’est pas un article d’analyse argumenté, c’est l’expression d’une opinion. Donc je dirais ni l’un ni l’autre, je l’ai écrit « sur le coup » en voyant les photos de verres de vin et de terrasse sur facebook, j’ai pris des notes, et j’ai commencé à écrire.
– Il a a partagé/liké plus de 350 000 fois, que vous inspire ce succès ?
Des yeux écarquillés. Et un haussement d’épaule. Je n’avais jamais publié sur Mediapart et je m’attendais à ce que 3 ou 4 personnes, maximum 10, le lisent. Mais le nombre de vues ou de partage n’a rien à voir avec le succès. Quand on voit que les vidéos qui ont le plus de succès sur youtube on a plutôt peur d’avoir trop de vues… Si succès il y a, c’est quand je reçois des messages de gens qui me disent « Je me sentais mal à l’aise par rapport à tout ça, et je ne savais pas pourquoi. Tu as mis des mots sur ce que je ressentais. Maintenant je me sens mieux. » Ça pour moi c’est un succès, parce que quand on écrit c’est ce qu’on veut : mettre des mots sur ce que les gens n’arrivent pas à exprimer. Pas parce qu’on est plus intelligents qu’eux, mais parce que les mots c’est notre matériau comme les couleurs pour le peintre. Ensuite il y a des gens qui m’écrivent pour me dire « Je voudrais agir mais je ne sais pas comment ». Parfois un texte, un film, une photo, une chanson, peut éveiller un déclic chez les gens, une petite graine plantée qui va germer s’ils en prennent soin. Si ma lettre, avec toutes ses maladresses, fait ça à quelques personnes, alors c’est un succès. Mais c’est moi qui vais apprendre le plus, car les gens m’écrivent et me font part de leur point de vue, de là où ils se trouvent, et ça c’est incroyablement enrichissant.
– Le titre de départ était « Je n’irai pas en terrasse ». Vous l’avez reformulé « je n’irai pas qu’en terrasse ». Pourquoi ?
En effet j’ai modifié le titre, suite à des critiques qui me disaient que les deux n’étaient pas incompatibles (aller en terrasse et agir). Ça me semblait absolument évident, mais pour être plus claire j’ai préféré changer le titre.
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